L’Afrique à la croisée des chemins en matière de TIC

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L’Union internationale des télécommunications (ITU), présentera un rapport intitulé « Indicateurs des télécommunications/TIC africaines, 2008 », à l’occasion de la tenue au Caire (Egypte) du 12 au 15 mai, de la manifestation ITU TELECOM AFRICA 2008 (Par Elias B).

Ce rapport, souligne le communiqué de l’UIT, propose un examen approfondi des principales lignes d’évolution du secteur et contient plusieurs recommandations visant à favoriser la croissance et à élargir l’accès aux technologies de l’information et de la communication (TIC) dans la région.

Téléphonie mobile : une croissance sans précédent en Afrique
L’essor du secteur de la téléphonie mobile sur le continent africain a défié toutes les prévisions. L’Afrique reste la région du monde qui connaît la plus forte croissance annuelle du nombre d’abonnés mobiles, puisqu’on a dénombré pas moins de 65 millions de nouveaux abonnés en 2007, souligne le rapport.

Début 2008, on recensait plus de 250 millions d’abonnés mobiles sur le continent. Le taux de pénétration de la téléphonie mobile est passé de 1 pour 50 habitants au début des années 2000 à près d’un tiers de la population actuelle. Par ailleurs, la répartition des abonnés mobiles est aujourd’hui plus uniforme. Alors que la République sud-africaine représentait plus de la moitié de l’ensemble des abonnés au téléphone mobile en Afrique en 2000, près de 85% des abonnés au mobile se trouvaient dans d’autres pays en 2007.

Le succès du mobile, dû en grande partie à l’ouverture à la concurrence, a également favorisé l’apparition de services novateurs comme le micropaiement en mode prépaiement (recharge), l’itinérance interrégionale avec tarif unique et l’essor des applications du commerce mobile.

Internet haut débit : Prix élevés, faible taux d’utilisation

Alors que les services mobiles sont devenus plus accessibles et abordables, l’accès à Internet, en général, n’a pas suivi la même évolution. D’après les estimations, il y aurait environ 50 millions d’internautes en Afrique en 2007, soit près d’un habitant sur vingt, dont plus de la moitié se trouveraient dans les pays d’Afrique du Nord et en République sud-africaine.

En Afrique subsaharienne, 3% seulement de la population sont connectés à Internet. L’insuffisance de la largeur de bande Internet internationale et l’absence de points d’échange Internet entraînent une hausse des prix. C’est en effet en Afrique, le continent le plus pauvre du monde, que les prix de l’accès à Internet sont les plus élevés: l’abonnement mensuel à Internet s’élève en moyenne à 50 USD, soit près de 70% du revenu moyen par habitant.

La pénétration du « large bande » est très faible sur l’ensemble du continent, puisqu’on dénombrait environ 2 millions d’abonnés au large bande fixe en 2007, soit moins du quart de la population de Lagos, ancienne capitale du Nigéria. Cinq pays africains seulement affichaient un taux de pénétration du large bande supérieur à un pour cent habitants en 2007, alors que dans les pays de l’OCDE, le taux de pénétration moyen du large bande était de 18,8 en juin 2007; le pays classé dernier, à savoir le Mexique, a un taux de pénétration (4,6) 38 fois plus élevé que le taux moyen en Afrique.

Ce sont essentiellement les zones urbaines qui bénéficient de l’accès au large bande fixe, le déploiement de cet accès étant limité par le fait que le marché du réseau téléphonique public à commutation, de qualité médiocre, est insuffisamment développé et n’est toujours pas ouvert à la concurrence.

L’avenir est dans le sans fil

Si le large bande doit se généraliser en Afrique, il s’appuiera probablement sur des technologies hertziennes telles que les services de la troisième génération (3G) et les techniques WiMAX. A Maurice et en République sud-africaine, le nombre d’abonnés à des services 3G a d’ores et déjà dépassé le nombre d’abonnés au large bande fixe.

Dans plusieurs pays africains, des technologies WiMAX commencent à être mises sur le marché après une première phase de déploiement expérimental. La généralisation des technologies hertziennes haut débit va sans nul doute intensifier la concurrence sur le marché du large bande en Afrique et il semblerait que les tarifs du large bande en Afrique soient moins élevés que dans les pays ayant déployé à la fois des techniques large bande fixes et sans fil.

Encourager l’utilisation d’énergies renouvelables
Le rapport indique également la pénurie d’électricité constitue toujours un grave obstacle au développement du marché des TIC en Afrique. La pénurie d’énergie et les pannes d’électricité entraînent en effet une hausse des prix, les opérateurs devant assurer la maintenance de leurs propres génératrices.

Les pouvoirs publics pourraient envisager d’accorder des dégrèvements fiscaux pour compenser les coûts énergétiques élevés à la charge des opérateurs de télécommunication. Ils pourraient faire bénéficier les entreprises locales fournissant de l’énergie renouvelable ou des équipements utilisant ces sources d’énergie aux opérateurs mobiles d’exonérations des droits d’importation et de réductions fiscales.

L’Afrique peut mieux faire
Au moment où s’achève la première décennie du nouveau millénaire, l’Afrique est à la croisée des chemins et les responsables des politiques dans le domaine des TIC se trouvent devant des choix importants.

Même si le marché du mobile a enregistré une croissance phénoménale, il ne sera pas facile de maintenir cette dynamique et d’étendre l’accès dans les domaines – par exemple l’Internet et le large bande – où l’Afrique reste à la traîne.

Pour accroître le nombre d’utilisateurs, il faudrait, préconise le rapport, cibler les segments de population à faible revenu. Or, ces abonnés potentiels sont très sensibles aux prix et le moindre changement peut être lourd de conséquences.
Il sera indispensable de faire baisser les prix pour élargir l’accès en Afrique. Une libéralisation plus poussée, conjuguée à la suppression des droits exclusifs qui sont toujours appliqués en matière d’accès au marché, à la diminution des redevances de licence et à la simplification ainsi qu’à la transparence des procédures d’octroi de licences, permettrait également d’accroître la concurrence et d’abaisser les coûts.

Le partage des infrastructures est particulièrement important dans une région qui a besoin à la fois d’investissements dans des installations TIC et d’une baisse des prix. Il serait donc logique, souligne-t-on, de limiter les chevauchements d’activité et de partager les infrastructures lorsque cela est possible. Pour leur part, les régulateurs pourraient contribuer à instaurer un climat de confiance entre les opérateurs et concevoir des politiques générales propres à promouvoir le partage des infrastructures.

En fin, à titre informatif ITU TELECOM AFRICA 2008, vitrine des TIC pour l’Afrique, est à la fois une Exposition qui présente les dernières innovations en matière de produits, d’applications et de services liés aux TIC, et un Forum de haut niveau qui réunit des P.-D. G., des ministres, des régulateurs et des décideurs, afin d’analyser et de forger l’avenir du secteur africain des TIC.