«Le satellite est la solution pour fiabiliser le réseau des entreprises»

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Algérie Télécom Satellite a récemment vu le jour suite à la décision de l’opérateur historique de filialiser son activité satellite. A sa tête, Mahieddine Maache, un vieux «routier» du secteur, avec plus de 30 ans de bons et loyaux services dans le domaine. Dans cet entretien, il revient sur les motivations de cette filialisation et évoque également de la situation du marché actuel des télécoms par satellite…

Mobilealgérie.com : Tout d’abord, présentez-nous votre entreprise et ses activités ?
Mahieddine Maache :
D’abord permettez-moi de me présenter. Je suis ingénieur polytechnique de formation. J’ai commencé ma carrière au niveau du Centre de Lakhdaria, qui était la seule station satellitaire dans les années 70. J’ai été directeur technique au Moyen-Orient (Riyadh en Arabie Saoudite) durant cinq ans, dans le cadre du projet Arabsat. J’ai également été fonctionnaire international et cadre au ministère des PTT…En tout, j’ai une expérience de 32 ans dans le secteur, et je me retrouve actuellement à la tête d’ATS. 
Algérie Télécom Satellite s’occupe de tout ce qui a trait aux télécommunications par satellite, que ce soit pour le fixe ou le mobile. Notre activité principale c’est le Vsat. On a commencé cette activité en 2000, avec une plateforme SCPC. On a acquis ensuite avec l’évolution technologique, une station DVB-RCS, soit l’équivalent de l’ADSL par satellite. Dernièrement, nous avons venons d’acquérir une plateforme I-Direct, une technologie dernier cri 100% IP (Internet Protocol, Ndr). Je tiens à signaler d’ailleurs, que toute la technologie des télécoms va tendre vers le 100% IP. On est donc à la pointe de la technologie. 
Algérie Télécom Satellite emploie plus de 120 personnes, des ingénieurs pour la plupart. Le siége de la société est à Ben Aknoun (Alger). Nous avons également cinq directions régionales : Constantine, Oran, Annaba, Ouargla et Béchar. 

Qu’est ce qui a incité la maison mère, Algérie Télécom à filialiser son activité Satellite ? 
Ce qui a poussé Algérie Télécom à créer une filiale satellite, c’est le marché et la réglementation. A partir du moment où une entreprise détient une licence dans un domaine particulier, elle doit filialiser cette activité. Algérie Télécom dispose actuellement de 03 filiales et donc de trois licences : une pour la téléphonie mobile (Mobilis), une autre pour Internet (Djaweb) et une troisième pour le Vsat (ATS). 
C’est donc le marché qui a dicté cette démarche, et aussi pour plus d’efficacité dans les activités. Le fonctionnement d’une entreprise est très lourd quand tout est centralisé. 

Quelle est votre vision du marché algérien actuel des services et produits
satellitaires ? 
En fait, le marché algérien des télécoms par satellite ne date pas d’hier. Sa naissance remonte aux années 70, avec notre réseau dans la Sud algérien. Il y a eu ensuite des activités dans le domaine qui n’était pas réglementées. C’était la jungle, celui qui veut faire son Vsat le fait. Ce qui fait qu’il n’y avait pas une vision claire sur le parc existant, même actuellement. Ce n’est qu’en 2004 qu’il y a eu l’octroi de licences dans le domaine du Vsat. 
Depuis cette ouverture la réglementation a permis de cerner davantage le marché. Ce marché est constitué essentiellement d’entreprises et les cybercafés. Les particuliers sont au nombre réduit, puisque ce sont des systèmes qui coûtent chers. 
Nos clients se comptent parmi les PME/PMI, les banques, les institutions et les sociétés issues du secteur pétrolier. 
Le réseau fixe couvre déjà pas mal le pays. Cependant, il souffre de coupures fréquentes, avec les câbles et les faisceaux hertziens. Mais le satellite ne connaît les problèmes de cette nature, grâce aux connexions directes qu’il permet. Avec ce système les entreprises peuvent fiabiliser leur réseau. Pour les zones isolées, c’est une autre affaire, car c’est le seul moyen de communication qui existe, comme c’est le cas au Sud algérien avec les entreprises pétrolières, et les particuliers assez aisés.
Avant l’arrivée du Vsat, c’est Imarsat qui était utilisé, des petites stations qui coûtaient très chères. 

Donc, le marché est encore à son balbutiement… 
Oui le marché est encore vierge. Pour vous donner un chiffre illustratif, en 2004 lorsqu’on a créé une direction centrale pour le Vsat, il y avait 200 stations. D’ici la fin de l’année nous compterons 2000 terminaux. Nous pensons aussi qu’il reste beaucoup à faire. 
Il faut savoir, cependant, que tout dépend de la propagation de la fibre optique, car beaucoup moins onéreuse que le Vsat. Sur le Vsat c’est le segment spatial qui coûte cher. Mais avec les technologies actuelles qui permettent de mutualiser les bandes, qui peuvent être utilisé par plusieurs abonnés, on se rapproche un peu du coût du système filaire. Le Vsat est concurrencé par les autres technologies télécoms. 
Pour imagé cela, en 2000 nous avons 5000 abonnés Thuraya, le système de télécommunications par satellite mobile. Avec l’ouverture du marché et l’arrivée des opérateurs mobiles, ce parc s’est rétrécis pour ne compter que 1000 abonnés. 

Quel est le créneau le plus porteur de vos activités ?
C’est le Vsat, comme on appelle dans le jargon économique le «core business». 

Quels sont vos projets immédiats et à long terme ? 
Dans l’immédiat on pense lancer l’I-Direct, qu’on vient d’acquérir et qu’on a terminé de tester. L’I-Direct est un système qui permet la communication de deux terminaux entre eux sans passer par la station maîtresse. Il sera lancé à partir de ce mois-ci. Nous avons déjà deux clients (des sociétés pétrolières) pour ce service. Il est très utilisé par notre partenaire Schlumberger, qui assure, entre autres, des services communication pour les pétroliers étrangers. 
Nous allons également lancer le GPS 100% satellite, différent de celui utiliser à bord des voitures. Un système qui peut aussi être utilisé pour gérer par exemple, une flotte de camions, comme cela peut être le cas pour Naftal. Il permet aussi d’autres utilisations : ouverture des coffres, des portières à distance, gérer les vannes des pipelines. 
En 2007, il sera lancé une station de communication interafricaine à Lakhdaria, dans le cadre du projet du satellite africain, Rascom, dont l’Algérie est actionnaire. Et nous allons aussi continuer à nos développer dans le secteur. 
On nous a dit que nous étions leader dans l’activité, sans que nous connaissions les chiffres des autres concurrents. Mais je tiens à signaler un fait, il y a beaucoup d’opérateurs qui ne sont pas connus et qui activent d’une manière informelle… 

Peut-on à ce propos avoir une idée sur vos concurrents ? 
Nos concurrents connus sont Orascom Télécom et Divona. Concernant, le volet chiffres, vous ne pouvez les avoir que chez l’ARPT. Il faut savoir aussi que sur ce créneau on ne pas s’improviser opérateur. Beaucoup se sont lancés et se sont ensuite cassés les dents. La difficulté réside dans la gestion de la bande passante du satellite, qui coûte très cher. La plupart des intervenants sur cette activité louent des segments chez des opérateurs étrangers, ce qui est parfaitement illégal. L’article 5 de la licence de l’activité satellite stipule que tout opérateur de Vsat doit avoir un Hub sur le territoire national pour contrôler les communications et la tarification. 

Un mot pour conclure
Je crois que l’Algérie est en bonne voie, avec l’ouverture du secteur. Je tiens à dire aussi vive la concurrence !